23
Avr
2025
0

« Le côté obscur de la force » revient en format poche!

Il est arrivé le 23 avril. L’édition de poche de mon livre « Le côté obscur de la force, enquête sur les dérives du ministère de l’Intérieur et de sa police », paru en octobre 2023 chez Flammarion, est désormais disponible en format de poche, chez J’ai Lu. Retrouver sa présentation ici:

Comme il s’est évidemment passé beaucoup de choses depuis la première édition, j’ai passé en revue l’ensemble du livre, pour y ajouter, ici et là, les actualités du ministère et de la sécurité intérieure. Et elles sont nombreuses, à commencer par le remplacement du ministre Gérald Darmanin, qui est resté plus de 4 ans en poste (un record!) par Bruno Retailleau, encore plus adepte que son prédécesseur d’une ligne de fermeté officielle et de communication à tous crins.

Cela ne résout en rien les maux chroniques de ce ministère, qui continue de ployer sous des millions de dossiers de plaintes non traitées (oui, des millions), une violence exacerbée, un trafic de drogue métastasé sur l’ensemble du territoire, un management archaïque, des instructions contradictoires et des politiques du chiffre de plus en plus aberrantes. Sans oublier des techniques de surveillance de plus en plus sophistiquées.

Personne n’a contesté les éléments que j’ai révélé dans l’édition initiale, notamment le déploiement étendu des techniques de renseignement depuis plus de 5 ans. Au contraire: les officiels interrogés sur le sujet ont confirmé mes infos, en considérant qu’il n’y avait là rien de bien grave, puisque tout est encadré…

Voilà donc une édition entièrement mise à jour, qui pèse son petit poids (608 pages), à un prix raisonnable de 10,5 euros. S’en priver serait contre-productif!

 

 

12
Avr
2025
0

Fin du procès Sarko-libyen : quelques impressions sur une audience historique

Le procès des financements libyens, appelé le procès Sarko-libyen, s’est achevé le 8 avril, avec les plaidoiries des avocats de l’ancien chef de l’Etat, qui ont naturellement demandé la relaxe, estimant que les charges contre lui étaient inexistantes, les éléments réunis par les juges d’instruction et le parquet étant, selon eux, une construction intellectuelle masquant le vide du dossier. Dans un dernier mot, Nicolas Sarkozy s’est élevé contre un réquisitoire « politique et violent ». Ces deux adjectifs, employés à dessein, laissent à penser qu’en cas de condamnation à son encontre prononcé par les juges du tribunal correctionnel de Paris le 25 septembre, il pourrait, comme Marine Le Pen suite à son jugement dans l’affaire des assistants parlementaires, dénoncer une justice « politique » qui ne chercherait qu’à l’abattre et à régler ses comptes.

Cà, c’est pour l’opinion, ainsi prise à témoin, voir prise en otage, par des dirigeants politiques qui préfèrent toujours se poser en victime d’un système judiciaire désireux de les condamner à tous prix, donc de les museler, avec l’aval tacite du « système », en oubliant souvent les charges précises qui ont conduit à leurs jugements. Car ces arguments de façade, ces éléments de langage politiques, ne résistent guère à l’analyse des faits. Dans le cas de Marine Le Pen, le jugement de 150 pages détaille le système de détournements de fonds en vue de financer son parti mis au point sous l’autorité de sa cheffe. Ayant fait appel, elle bénéficie, comme bon nombre de ses co-prévenus, de la présomption d’innocence, malgré l’inéligibilité immédiate qui la sanctionne. Ce sera la même chose pour Nicolas Sarkozy s’il est condamné le 25 septembre, car il pourra faire appel, ainsi que ses amis Claude Guéant, Brice Hortefeux, Eric Woerth, Thierry Gaubert, preuve que l’état de droit fonctionne en France, malgré les critiques qui l’assaillent.

Le procès des financements libyens, auquel j’ai pu assister en grande partie sur les rangs de la presse, a été, quant à lui, riches d’enseignements. Il s’agissait, faut-il le rappeler, du plus grand procès de corruption présumée au plus haut niveau, depuis le début de la Vème République, avec un ancien Président et trois de ses anciens ministres sur le banc (avec d’autres prévenus, dont certains en fuite). Or, à l’exception de la presse écrite, il a été finalement assez peu couvert par les grands médias, hormis le premier et le dernier jour, comme si le sujet était trop dérangeant pour certains médias proches de la nébuleuse de Sarkozy. Il est vrai que j’ai pu voir des figures de ces médias venir en force le dernier jour pour écouter les avocats de Sarkozy, sans jamais avoir assisté aux audiences précédentes, ni écouté les trois jours de réquisitoire implacable des avocats généraux représentants le parquet national financier… Le traitement médiatique du procès Sarko-libyen reflète, en réalité, l’influence de télés et radios alliés, de longue date, à l’ancien président, toujours bien protégé.

Ce silence n’a pas empêché la tenue d’une audience riche, de débats révélateurs, soutenus, éclairants, sur bien des aspects du dossier, fruit de dix ans d’instruction, de 180 auditions, de milliers de pages et documents assemblés par la justice. A l’argument répété à longueur de temps par Nicolas Sarkozy selon lequel le dossier serait vide, l’audience a apporté la preuve du contraire : des témoignages, des carnets, des agendas, des rendez-vous secrets, des notes manuscrites, des écoutes téléphoniques, des documents bancaires, des retraits d’espèces suspects, la location de coffre-forts, etc. Autant d’indices graves et concordants selon le parquet, graves mais pas concordants selon la défense. La plupart des prévenus ont nié les faits, ou les ont minimisés, certains se noyant dans des explications fumeuses, incompréhensibles, contradictoires. Les dénégations répétées n’ont pas dissipé les soupçons, au contraire.

La chronologie détaillée des faits étaye, d’après l’accusation, l’existence d’un pacte de corruption noué entre l’équipe de Sarkozy et les proches de Kadhafi, à partir d’octobre 2005, dans le but d’aider le candidat pour son élection présidentielle de 2007, en échange d’appuis et de contreparties en faveur du régime libyen. À commencer par la possible levée de la condamnation à perpétuité, prononcée en 1999 en France, pesant sur Abdallah Senoussi, maitre-espion et terroriste en chef du régime, coupable d’avoir orchestré l’attentat contre le DC10 d’UTA ayant tué 180 personnes le 19 septembre 1989. Ce personnage central est au cœur de cette affaire, comme nous l’avons écrit dans notre livre « L’assassin qu’il fallait sauver », co-écrit avec Karl Laske et le libyen Samir Shegwara (qui est actuellement menacé en Libye) Même si cette immunité n’a finalement pas été accordée à Senoussi, elle a fait l’objet de nombreux contacts et réunions, y compris jusqu’en 2009 à l’Elysée, confortant ainsi l’idée que ce sujet était bien au coeur du présumé « pacte faustien » dénoncé par les procureurs.

Nicolas Sarkozy s’en est défendu, affirmant qu’il n’avait rien à voir avec tout cela, que ses lieutenants ont sans doute commis des erreurs, voire des fautes de naïveté, sans que cela le concerne. Selon lui, il n’a jamais été mis au courant des rendez-vous secrets à Tripoli entre ses deux proches Claude Guéant, Brice Hortefeux et le terroriste Senoussi, qui constituent les pièces centrales de l’accusation. La théorie avancée par ces derniers – ils seraient tombés tous les deux dans un « piège » tendu par l’intermédiaire Ziad Takieddine pour ces rencontres avec Senoussi – a été considéré comme peu crédible lors des débats. Car il a été établi que le rendez-vous de Guéant a sans doute été préparé en avance. De plus, ni Guéant ni Hortefeux n’ont alerté quiconque, à leur retour, de ce piège prétendu. Et ils ont poursuivi, ensuite, leurs relations avec Takieddine, comme s’ils n’avaient finalement pas grand-chose à lui reprocher…

Ces éléments ont particulièrement ému – et choqué – des familles des victimes de l’attentat du DC10 d’UTA qui étaient parties civiles dans ce procès (ce que les avocats de Sarkozy ont jugé infondés, contrairement au parquet). Par leur présence, par leurs témoignages émouvants à la barre, par leurs mots sévères, accusant Nicolas Sarkozy et ses proches de les avoir trahis en voulant blanchir Senoussi, l’assassin de leurs proches, ces familles ont donné à ce procès une autre dimension. Il ne s’agissait pas seulement d’un procès d’argent noir, de corruption à haut niveau, mais également celui des présumées manœuvres destinées à effacer les crimes terroristes du régime Kadhafi.

Le parquet (voir le tableau détaillé) a requis 7 ans de prison ferme à l’encontre de Sarkozy, 6 ans contre Guéant, 3 ans contre Hortefeux, 1 an contre Woerth. Soit des réquisitions très hautes pour ce procès hors-normes. Les juges vont peser tous ces éléments, et bien d’autres non mentionnés ici tant il y avait d’arcanes dans ce dossier, pour se prononcer le 25 septembre prochain. Avant même son jugement, ce procès a déjà marqué l’histoire.

-Pour en savoir plus, j’ai participé, le 11 avril, à un débat sur la chaine LCP, sur ce procès, dans le cadre de l’émission Débatdoc animé par Jean-Pierre Gratien, avec mes confrères Fabrice Arfi (Mediapart) et Timothée Boutry (Le Parisien-Aujourd’hui en France). Une émission à retrouver en replay ici.

-Nous étions invités, Karl Laske et moi, à parler de notre livre « L’assassin qu’il fallait sauver » et du procès Sarko-libyen, par Marc Endeweld, dans le cadre de son émission « La boîte noire », auposte.fr. Un grand format, à retrouver ici.

7
Avr
2025
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Nous demandons la libération de notre co-auteur Samir Shegwara, emprisonné en Libye

Rebondissement dans les suites de la publication de notre livre « L’assassin qu’il fallait sauver », co-signé avec Karl Laske et le lanceur d’alerte libyen Samir Shegwara, basé sur des archives inédites d’Abdallah Senoussi, l’ancien chef des services secrets, condamné à la perpétuité par contumace pour l’attentat ayant détruit le DC10 d’UTA le 19 septembre 1989.

Alors que Samir Shegwara avait déjà auto-publié en Libye en 2018 des documents des services secrets et revendiqué leur diffusion dans des premiers articles de Mediapart dès cette époque, la publication de notre livre en janvier 2025, et surtout la diffusion, le 18 mars, d’un article de la BBC Scotland mentionnant l’intérêt des autorités judiciaires écossaises pour ces documents, notre co-auteur a été interpellé le 20 mars, à 14h30 à son bureau de maire du quartier Andalousie, à Tripoli. Incarcéré et poursuivi pour « détention de documents classifiés » et atteinte  « à la sécurité nationale », il a été provisoirement remis en liberté du 1er au 5 avril, avant d’être à nouveau incarcéré, dans l’attente d’un procès imminent.

L’arbitraire semble prédominer dans cette procédure. Il s’agit sans doute de faire pression et d’empêcher ce dénonciateur des crimes commis par l’ancien régime de Kadhafi de s’exprimer, voire de témoigner devant des cours française ou anglo-saxonnes, dans le cadre des procédures sur les attentats du DC10 d’UTA et de Lockerbie (Ecosse, 21 décembre 1988). L’ancien chef de l’enquête au FBI sur ce dernier attentat, Richard Marquise, a commenté sur la BBC la teneur des documents publiés dans notre livre, comme de la « dynamite » potentielle, car ils impliquent de manière plus précise les autorités libyennes dans cet attentat. Le procès du présumé artificier libyen, appelé Masud, est en cours de préparation aux Etats-Unis.

Ces poursuites contre Samir Shegwara constituent, selon nous, des atteintes à la liberté d’expression et des entraves à la manifestation de la vérité.

Suite à cette arrestation, notre éditeur Robert Laffont a publié, le 4 avril, un communiqué (voir  ROBERT LAFFONT )  son souhait que ces poursuites cessent contre un auteur. Certaines familles des victimes de l’attentat du DC10 d’UTA ont également dénoncé ces entraves, et ont saisi, le 7 avril, le président de la République Emmanuel Macron à propos du sort de Samir Shegwara.

Nous exprimons notre inquiétude à ce sujet et poursuivons nos efforts pour le soutenir.

Un article de Mediapart explique la situation, ainsi qu’un long sujet de la BBC et un article sur RFI.

2025 04 03. Le dénonciateur des crimes de Kadhafi a été arrêté à Tripoli Mediapart

2025 04 05 Libye_ RFI Samir Shegwara, lanceur d’alerte, qui a dénoncé les crimes de Kadhafi, visé par la justice de son pays

2025 04 03 BBC Lockerbie bombing whistleblower arrested in Libya

Voici l’intégralité du communiqué de Robert Laffont du 4 avril 2025

« Les éditions Robert Laffont ont appris l’arrestation le 20 mars dernier à Tripoli de Samir Shegwara,

coauteur avec Karl Laske et Vincent Nouzille de L’Assassin qu’il fallait sauver,

et l’ouverture à son encontre d’une procédure pour « possession présumée

de documents de sécurité classifiés, sans justification légale ».

Lesdits documents, issus des archives d’Abdallah Senoussi – ancien directeur du

renseignement militaire libyen – et dont l’authenticité ne saurait être remise en

cause, sont d’un intérêt public et historique majeur en Libye

comme en France, en Ecosse et aux Etats-Unis.

Ils sont par ailleurs le socle de l’ouvrage L’Assassin qu’il fallait sauver, consacré aux

attentats commis par les services secrets libyens contre le Boeing de la Pan Am à

Lockerbie, le 21 décembre 1988, et le DC 10 d’UTA reliant Brazzaville et Paris, le19 septembre 1989.

Ayant reçu le soutien du Conseil des Sages de la Municipalité du Grand Tripoli auquel

il appartient, Samir Shegwara a été heureusement remis en liberté provisoire

ce mardi 1er avril ; il reste toutefois sous la menace d’une réincarcération et d’un

procès les prochains jours.

Les éditions Robert Laffont déplorent les poursuites menées contre Samir

Shegwara ainsi que les pressions qui semblent s’exercer contre lui afin qu’il rétracte

sa dénonciation des crimes commis par l’ancien régime de Mouammar Kadhafi.

À ce titre, elles s’associent à ses deux coauteurs Karl Laske et Vincent Nouzille

pour demander aux autorités libyennes l’arrêt des poursuites à son encontre.

9
Fév
2025
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« L’assassin qu’il fallait sauver »: médias et premières suites judiciaires

La publication de notre livre « L’assassin qu’il fallait sauver, au coeur de l’affaire Sarkozy-Kadhafi » (Robert Laffont) a déjà provoqué des réactions et des commentaires dans les médias. Parmi elles:

-Des extraits parus sur le site Mediapart, titré: « Les plans secrets du terroriste Abdallah Senoussi, l’homme que Sarkozy voudrait faire oublier« . A retrouver ici pour les abonnés, ou ici en PDF Mediapart

-Une longue interview de Karl Laske et de moi, sur le site de l’Express, par Etienne Girard, titrée « Des attentats libyens à l’affaire Sarkozy: « les services secrets ont fait du hors-procédure ». A lire sur le site de l’Express ici, ou en PDF l’Express.

-Une interview pour Radio France International, réalisée par Christophe Boisbouvier, diffusée le 4 février dernier, titrée: « La justice française suspecte qu’il y a eu un deal secret« . A réécouter ici en version longue ou à lire partiellement ici RFI

-Une présentation du livre, par Franck Johannés, dans le Monde du 9 février, titrée « Plongée dans les archives secrètes d’Abdallah Senoussi, l’homme de confiance de Mouammar Kadhafi ». A lire sur le site du Monde ici, ou en PDF Le Monde 

 

 

 

Voici quelques commentaires dans ces articles

« Les deux journalistes dévoilent les ramifications d’une affaire d’Etat, où il est question de services secrets français, de marchandage et de gros billets »

« Un livre incroyable et glaçant qui détaille posément la préparation, les comptes rendus et les pedigrees des acteurs des principaux attentats »

« Un énorme travail soigneusement étayé par un appareil de notes dans la meilleure veine des enquêtes anglo-saxonnes »

Merci à tous! D’autres interviews et articles à venir…

 

Par ailleurs notre livre a également commencé à intéresser des autorités judiciaires. Il a d’abord été versé aux débats du procès de l’affaire Sarkozy-Kadhafi, puisque certains des documents détaillés dans le livre, ont déjà nourri partiellement l’instruction: c’est le cas des compte-rendus libyen d’une réunion importante du 25 novembre 2005 entre des avocats français et des avocats de Senoussi, afin d’étudier comment régler le problème de la condamnation de Senoussi. Ce qui constitue un des éléments-clés de l’accusation concernant le présumé « pacte corruptif » noué entre l’équipe Sarkozy et les proches de Kadhafi.

De plus, de nombreux autres documents libyens que nous révélons dans le livre, totalement inédits, ajoutent de nouvelles pièces dans le vaste puzzle des enquêtes portant sur l’affaire dite de Lockerbie, l’attentat contre l’avion Pan Am 103, qui a tué 270 personnes le 21 décembre 1988, et celui de l’affaire de l’attentat contre le DC10 d’UTA, ayant tué 170 personnes le 19 septembre 1989.

De nouveaux documents et de nouveaux noms apparaissent, liés aux préparatifs de ces attentats. C’est la raison pour laquelle des familles des victimes de l’attentat du DC10 souhaiteraient réactiver l’enquête sur cette affaire en France, sur la base des documents que nous publions. C’est aussi pourquoi les justice américaine et écossaise ont déjà manifesté leur intérêt pour le livre, principalement dans le cadre de la préparation du procès de l’artificier présumé de l’affaire Pan Am, appelé Masud, qui doit se tenir aux États-Unis d’ici quelques mois.

Suite à un contact avec le bureau de la procureure générale d’Ecosse, j’ai d’ailleurs été questionné ces jours derniers par les responsables de la police écossaise en charge de l’enquête sur Lockerbie, qui reste donc toujours ouverte. Ils s’intéressent à plusieurs documents inédits de notre livre. Une fois les indispensables vérifications faites, ces documents seraient susceptibles d’apporter de nouveaux éléments à la justice et aux familles des victimes… plus de 36 ans après cette tragédie. A suivre….

 

27
Jan
2025
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Virginia Hall, l’espionne oubliée, revit devant des lycéens

Expérience émouvante : à Saint-Etienne, devant près de 200 lycéens et collégiens, le 24 janvier, j’ai pu raconter l’histoire de Virginia Hall, cette espionne américaine oubliée, héroïne de la IIème guerre mondiale, qui participa à la résistance et à a Libération de la France.

A l’occasion des commémorations des 80 ans des débarquements et de la Libération, les rectorats de la région Auvergne-Rhône-Alpes, avec le consulat américain à Lyon, m’ont convié, ces derniers mois, à retracer l’itinéraire de cette Américaine, qui a œuvré de 1940 à 1945, dans notre pays. La biographie de « L’espionne Virginia Hall, une américaine dans la guerre » (Fayard, 2007, voir la présentation ici) que j’ai rédigée il y a de cela pas mal d’années, me sert de base à ces conférences devant des publics scolaires. Cela a commencé en octobre 2024 devant des professeurs d’histoire de l’académie de Clermont-Ferrand, puis en décembre aux archives départementales du Rhône, avec une centaine d’enseignants du rectorat de Lyon. Les profs initient parallèlement des projets dans leurs lycées respectifs, dans le cadre du Concours national de la résistance et la déportation, qui a pour thème, durant cette année 2024-2025 : « Libérer et refonder la France (1943-1945) ». Les lycéens peuvent préparer des projets personnels ou collectifs sur ce thème, en se basant sur des personnages impliqués dans cette période. Les résultats du Concours national seront rendus publics en juin prochain.

Pour ma part, après deux exposés avec des profs, je me suis rendu au lycée Jean-Monnet de Saint-Etienne, qui dispose d’une section internationale et d’une section audiovisuelle, qui m’ont accueilli à bras ouverts. Environ 70 lycéens m’ont écouté en présentiel, et ma conférence était captée et retransmise à plus 120 élèves d’une dizaine de collèges et de lycées du rectorat de Lyon.

J’ai ainsi pu narrer le parcours atypique de Virginia Hall : née à Baltimore, cette jeune femme polyglotte, secrétaire dans les ambassades américaines en Europe, se destinait avant la guerre à une carrière de diplomate, mais elle en fut empêchée du fait son statut de femme et son handicap (elle avait été amputée de la jambe gauche après un accident de chasse en Turquie en 1931). Démissionnant du département d’Etat en 1939, elle a rejoint la France et s’est engagée dans l’armée française comme ambulancière en 1940, avant d’être recrutée par les services secrets britanniques (SOE) en 1941. Elle fut la première femme envoyée pour une mission de longue durée en France.

Arrivant à Vichy et Lyon en septembre 1941 avec la couverture de journaliste américaine, Virginia Hall devint, jusqu’à son départ précipité fin 1942, le principal atout du SOE en France, aidant la résistance lyonnaise et bien au-delà. Trahie par agent double et pourchassée par Klaus Barbie qui la considérait comme « l’agent allié le plus dangereux », Virginia Hall franchit secrètement à pied les Pyrénées fin 1942 dans des conditions éprouvantes, pour revenir finalement à Londres après un séjour dans les prisons espagnoles. Bien que grillée en France, elle revint dans l’hexagone en mars 1944, avec l’appui de l’OSS (services américains) et une valise radio, afin d’aider les résistants et les maquisards à s’armer et libérer leurs territoires. Son aide fut essentielle pour libérer le Cher, la Nièvre et la Haute-Loire (voir l’article du Progrès de Haute-Loire de l’été dernier ici Virginia Hall le progrès) jusqu’en septembre 1944. Elle continua ensuite de s’activer pour préparer d’autres missions pour l’OSS jusqu’en mai 1945.

Indomptable, amoureuse de la France, farouchement libre, Virginia Hall échappa à toutes les arrestations et vécut dans le Maryland, dans jamais rien dire de ses exploits, jusqu’à son décès en 1982.

C’est ce destin méconnu que j’ai raconté en détail aux élèves, après l’avoir fait dans mon livre, sur la base de milliers de pages d’archives des services secrets que j’ai dénichées au Royaume-Uni et aux USA, ainsi que de documents du Centre d’histoire de la résistance et de la déportation de Lyon et des témoignages. Et les lycéens m’ont posé beaucoup de questions sur ses missions et son caractère ! Merci à eux et à tous ceux qui ont organisé ces conférences.

La télévision TL7 était sur place à Saint-Etienne et a diffusé ce sujet sur mon intervention.

 

22
Jan
2025
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Pourquoi les familles des victimes du DC10 d’UTA réclament justice au procès de l’affaire Sarkozy-Kadhafi

Read this article Why DC10 families are demanding justice

« Une dinguerie ! » C’est avec ces mots directs que Danièle Klein (voir photo ci-dessus) commente le procès des financements libyens auquel elle assiste depuis le premier jour le 6 janvier dernier. Regard clair, voix posée, Danièle Klein, qui va témoigner à la barre, n’y vient pas par hasard. Son frère Jean-Pierre est décédé le 19 septembre 1989 dans l’attentat contre le DC10 d’UTA, qui a tué au total 170 passagers et membres de l’équipage. Or le cerveau de cet attentat, le libyen Abdallah Senoussi, est au coeur de l’affaire Sarkozy-Kadhafi, qui fait l’objet du procès en cours au tribunal correctionnel de Paris.

Après plusieurs années d’enquête, le juge Jean-Louis Bruguière avait, en effet, remonté la piste des exécutants et responsables de cet attentat, qui se situait au cœur des services secrets libyens, dirigés par Abdallah Senoussi, beau-frère de Kadhafi et responsable de ses basses œuvres. Six agent libyens, dont Senoussi, ont été condamnés par contumace, à la perpétuité, par une cour d’assises spéciale en mars 1999. Des mandats d’arrêt internationaux ont alors été délivrés par la France contre ces terroristes.

Or, après cette condamnation, le pouvoir libyen, Kadhafi en tête, a tout fait pour obtenir l’impunité judiciaire pour Senoussi, qui était un des plus hauts dirigeants du régime. Le sujet a été abordé dès 2003 lors des négociations sur les indemnisations des familles des victimes, qui se sont conclues en janvier 2004. Kadhafi en a reparlé au président Chirac lors sa venue à Tripoli en novembre 2004.

Mais c’est surtout avec l’équipe de Nicolas Sarkozy que le sujet a été remis sur la table fin 2005 dans des conditions les plus controversées. A deux reprises, Senoussi – pourtant persona non grata pour les Français, à cause de sa condamnation – a rencontré secrètement ses proches de Sarkozy : Claude Guéant, son directeur de cabinet, et Brice Hortefeux, ministre délégué et fidèle d’entre les fidèles. Les deux hommes plaident le « guet-apens », mais l’argument est jugé peu crédible par le parquet, parce qu’ils n’en ont fait aucunement état à leur retour, ni fourni durant l’instruction d’explications plausibles sur les conditions de ces entretiens secrets, organisés par l’entremise de l’intermédiaire sulfureux Ziad Takieddine.

Selon les juges ayant mené l’instruction, un pacte de corruption aurait alors été noué : de l’argent pour financer la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en échange de l’impunité judiciaire promise à Senoussi. Kadhafi a d’ailleurs évoqué la situation pénale de son beau-frère devant Sarkozy, venu en visite officielle à Tripoli le 6 octobre 2005.

Quelques semaines plus tard, le 25 novembre 2005, l’avocat ami de Sarkozy, Thierry Herzog, accompagné de son confrère Francis Szpiner (ce dernier conteste ce fait) se sont rendus en Libye pour discuter avec les avocats de Senoussi des options possibles pour faire tomber cette condamnation à perpétuité. La justice dispose, en l’occurrence, du compte-rendu libyen de cette réunion, qui provient des archives de Senoussi lui-même. Ce document, transmis à la justice en 2018 et attesté par l’avocate libyenne Azza Maghur, qui assistait à cette réunion, fait partie des documents des archives de Senoussi que Karl Laske et moi déatillons et révélons dans le livre « L’assassin qu’il fallait sauver », publié ces jours derniers chez Robert Laffont.

D’autres documents de l’instruction viennent étayer l’hypothèse selon laquelle l’équipe Sarko a continué de s’occuper du dossier Senoussi au moins jusqu’en mai 2009, notamment des échanges entre Senoussi et Herzog, et une note sur une réunion à l’Elysée entre Claude Guéant, secrétaire général, et Ziad Takieddine, proche de Senoussi. A la barre du tribunal, ces jours derniers, Claude Guéant s’est défendu de toute intervention dans cette affaire, mais il a confirmé qu’il s’agissait, lors de ce rendez-vous avec Takieddine en mai 2009, de « clore » le dossier Senoussi. Ce qui démontre qu’il était « ouvert » au moins jusque-là.

Pour Danièle Klein et plusieurs autres membres des familles des victimes du DC10 d’UTA, ces discussions des proches de Sarkozy pour blanchir Senoussi, l’assassin de leurs proches, constitue bien une « dinguerie », un affront, pire une trahison. Derrière les soupçons de corruption et de financement illégal de ce dossier, il y a ce attentat meurtrier que l’on voulait effacer, cet assassin qu’il fallait sauver.

Plusieurs dizaines de membres des familles des victimes du DC10 d’UTA se sont constituées parties civiles dans le procès en cours sur les financements libyens. Certains vont témoigner à la barre jeudi 23 janvier de leur parcours et de leur demande de justice.

 

PS : Le mandat d’arrêt international à l’encontre d’Abdallah Senoussi est toujours actif. Rien n’empêcherait la France de demander à nouveau à la Libye son extradition afin qu’il puisse à nouveau être jugé. D’autant que de nouveaux documents, que nous publions dans notre livre, notamment sur l’affaire du DC1O d’UTA – et aussi celle de l’attentat de Lockerbie, qui a tué 270 personnes le 21 décembre 1988 – fournissent des révélations et de nouveaux noms, qui peuvent intéresser les magistrats. Tous les documents et détails dans notre livre.

14
Jan
2025
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Quand Kadhafi offrait ses condoléances aux familles des «innocents passagers » du DC10 d’UTA

Le cynisme de Kadhafi n’avait aucune limite. Des archives inédites, libyennes et françaises, que Karl Laske et moi dévoilons dans notre livre « L’assassin qu’il fallait sauver », sorti ces jours-ci chez Robert Laffont, en apportent plusieurs preuves flagrantes.

[read this article in english here:Gaddafi’s condolences to families of innocent victims in DC10 case ]

Alors que, comme nous le révélons, son beau-frère et chef des services secrets Abdallah Senoussi a préparé minutieusement l’attentat qui a fait exploser le DC10 d’UTA au-dessus du désert du Ténéré (Niger) le 19 septembre 1989, provoquant la mort de 170 personnes, le dictateur libyen prend sa plus belle plume quelques jours tard pour présenter ses condoléances « les plus sincères » aux familles des « innocents passagers » morts dans ce qu’il appelle un « accident ». Ce message inédit (voir détail ci-dessous) que nous avons déniché dans les archives du Quai d’Orsay, est transmis le 25 septembre 1989 au président François Mitterrand par l’intermédiaire du représentant à Paris du Bureau populaire de la grande Jamahiryia libyenne populaire et socialiste. Kadhafi y écrit :

« Monsieur le président,

Nous avons appris avec tristesse e émotion la nouvelle de l’accident de l’avion civil français qi a coûté la vie à ses innocent passagers. Je vous adresse personnellement ainsi qu’aux familles des victimes les condoléances les plus sincères. Colonel Mouammar Khadafi. »

 

En termes de « sincérité », le dictateur, responsable du terrorisme d’Etat libyen qui a fait des centaines de morts dans les années 70 et 80 se pose en curieux champion !

Et ce n’est pas tout. Dès le surlendemain de l’attentat, alors que les enquêteurs français nagent en plein brouillard pour trouver une piste permettant d’identifier les coupables de cette tuerie de masse, des officiels libyens font passer des messages à des diplomates français à Tripoli visant à démontrer leur bonne volonté et à orienter l’enquête vers… le Mossad israélien. Dans un télégramme daté du 21 septembre 1989 (voir extrait ci-dessous) issu des archives diplomatiques françaises, Pierre Blouin, l’ambassadeur de France à Tripoli écrit : « Depuis la catastrophe aérienne du 19 septembre, les autorités libyennes multiplient les signaux pour se disculper de toute implication dans la destruction de l’appareil d’UTA », notamment en ayant autorisé le survol de leur territoire pour les avions français chargés des recherches des débris de l’appareil dans le désert. Le diplomate ajoute : « L’un des mes collaborateurs a été approché par des libyens chargés de lui faire savoir que leur pays n’était pour rien dans cette affaire e qu’il convenait d’en rechercher les coupables du côté des services israéliens ».

L’ambassadeur poursuit : « Ce zèle n’a évidemment aucune valeur probante, mais il est évident que la Libye doit être considérée comme innocente de toute responsabilité dans ce drame aussi longtemps que la preuve du contraire n’aura pas été apportée. A cet égard, je déplore que certains médias – et notamment des journalistes de radio France International – se soient crus autorisés à commenter l’implication de la Libye dans ce qui pourrait être un attentat terroriste ».

Les journalistes, en l’occurrence, avaient raison, avec beaucoup d’avance. Mais le Quai d’Orsay ne voulait pas croire à la duplicité libyenne. Durant des années, ses responsables auront même du mal à se convaincre, comme nous le racontons dans le livre, qu’il s’agissait réellement d’un attentat commandité par Kadhafi et organisé par Senoussi.

A l’égard des Américains, le cynisme libyen sera équivalent dans l’affaire de l’avion Pan Am, détruit le 21 décembre 1988 au-dessus de Lockerbie, en Ecosse, avec 270 morts à la clé. Lorsque les enquêtes américaines et écossaises conduisent à l’inculpation de deux agents libyens, mi-novembre 1991, Kadhafi est prêt à tout, là encore, pour tromper ses interlocuteurs occidentaux. Il fait alors semblant d’écarter Abdallah Senoussi de la tête des services secrets, en annonçant la nomination d’un nouveau patron des services, le colonel Youssef El Dibri, ce qui ne constitue qu’une diversion, Senoussi restant aux mannettes. Et surtout, Kadhafi envoie, le 17 décembre 1991, un message secret au président américain Georges Bush. Ce « message oral » est envoyée par l’intermédiaire de l’ambassadeur belge à Tripoli, qui représente les intérêts américains (du fait de la rupture des relations diplomatiques entre les Etats-Unis et la Libye depuis 1979), reçu par Kadhafi de manière impromptue. Les diplomates belges en informent aussitôt leurs collègues français à Tripoli, qui transmettent son contenu à Paris dans un télégramme, ce qui explique pourquoi nous en avons trouvé la trace dans les archives du Quai d’Orsa (voir l’extrait ci-dessous)

Dans ce message, Kadhafi explique à Bush qu’il va lui adresser un document argumenté de 49 pages visant à orienter l’enquête sur l’attentat Pan Am vers d’autres pistes que la Libye. Il propose que son nouveau chef des services secrets puisse coopérer avec la CIA et d’autres services dans l’enquête sur les attentats de Lockerbie et d’UTA. « Si une coopération directe pose problème, on pourrait passer par l’’intermédiaire de l’Egypte » insiste-t-il. Kadhafi se dit ouvert à la coopération, mais il n’en fera rien, car il ne cessera de clamer l’innocence de la Libye dans ces attentats, tout comme son beau-frère Senoussi.

Les documents issus des archives de Senoussi lui-même, que nous détaillons dans le livre, prouvent aujourd’hui l’ampleur du mensonge libyen de l’époque.

9
Jan
2025
0

Jour J pour la sortie de « L’assassin qu’il fallait sauver, au coeur de l’affaire Sarkozy-Kadhafi »

Le procès de Nicolas Sarkozy et de ses proches a débuté lundi 6 janvier au tribunal correctionnel de Paris, avec une grande affluence médiatique, des premières joutes procédurales et des promesses de combats judiciaires farouches durant plus de 3 mois.

Au premier rang, sur les bancs, l’ancien président, mutique les premiers jours, aux côtés des anciens ministres Eric Woerth, Brice Hortefeux et Claude Guéant, ainsi que des intermédiaires financiers. Tous présumés innocents. Suspectés d’avoir contribué, de près ou de loin, au pacte corruptif présumé entre le régime de Kadhafi et l’équipe Sarkozy, avec des financements en échanges de contreparties diverses. Parmi elles, un sujet sensible: l’impunité possible pour Abdallah Senoussi, condamné par contumace en 1999 à la perpétuité, dans l’affaire du DC10 d’UTA (170 morts). Beau-frère de Kadhafi, homme-clé du régime, Senoussi était au centre des discussions.

Karl Laske et moi publions ce 9 janvier un livre qui raconte l’histoire complète de ce terroriste d’Etat que certains voulaient sauver. Un livre basé sur des archives inédites de Senoussi lui-même, qui nous ont été fournies par un citoyen libyen, Samir Shegwara. Voici la présentation de ce livre, préfacé par Fabrice Arfi, qui retrace, de l’intérieur, plusieurs décennies de cette dictature, entre terrorisme et corruption….

« Les collaborateurs de Nicolas Sarkozy n’auraient jamais dû croiser la route d’Abdallah Senoussi, le maître espion de Mouammar Kadhafi, condamné pour terrorisme à Paris en 1999.

Ses archives récemment découvertes parlent. Essais d’explosifs dans le désert. Livraisons d’armes cachées. Repérages des lignes aériennes et des aéroports les plus propices. Réunions au sommet. Les services secrets du régime n’avaient rien laissé au hasard. Ils ont fait exploser le Boeing de la Pan Am au-dessus de Lockerbie le 21 décembre 1988, et le DC10 d’UTA le 19 septembre en plein désert du Ténéré. Un bilan total de 440 morts.

Une fois sa responsabilité établie par des enquêtes occidentales, la Libye, frappé d’embargo, a voulu montrer patte blanche. Elle a négocié avec les services secrets français, accepté des procès a minima, payé des indemnités aux victimes, tout en cherchant à tirer d’affaire Abdallah Senoussi.

C’est ainsi que l’espion libyen est devenu, dans l’ombre, une clé de la réconciliation avec les États-Unis et de la lune de miel franco-libyenne. Selon les archives libyennes, l’entourage de Nicolas Sarkozy lui aurait alors proposé d’agir en faveur de la révision de son procès en France, et la levée de son mandat d’arrêt. Il était l’assassin qu’il fallait sauver. L’homme de la compromission la plus grave.

Incarcéré en Libye depuis 2012, l’ancien maître espion libyen est aujourd’hui au cœur du procès de Nicolas Sarkozy et de son équipe dans l’affaire des financements libyens. »

Plus d’infos à venir sur la sortie du livre.

 

A voir également au cinéma en salles: « Personne n’y comprend rien« , le film documentaire de Mediapart sur l’affaire libyenne.

 

5
Jan
2025
0

J-4 pour la sortie du livre «L’assassin qu’il fallait sauver, au coeur de l’affaire Sarkozy-Kadhafi »»

L’année 2025 démarre fort côté actualité, avec, demain 6 janvier, le début du procès de Nicolas Sarkozy et de plusieurs de ses anciens ministres pour le présumé « financement libyen ». Et le 9 janvier sort en librairie le nouveau livre que je co-signe avec Karl Laske (de Mediapart) titré « L’assassin qu’il fallait sauver, au cœur de l’affaire Sarkozy-Kadhafi » (Robert Laffont). Cette enquête, à la fois historique et contemporaine, raconte l’histoire incroyable de la Libye du colonel Kadhafi, son implication au plus haut niveau dans le terrorisme et ses manoeuvres pour tenter d’effacer ce lourd passé.

Ce projet de livre a débuté il y a plus de 5 ans, après un premier contact noué par mes confrères Karl Laske et Fabrice Arfi  de Mediapart – qui ont révélé de nombreux aspects de l’affaire libyenne de Sarkozy, laquelle fait l’objet d’un film documentaire titré « Personne n’y comprend rien » qui sort en salles le 8/1 – avec un citoyen Libyen, nommé Samir Shegwara. Cet ancien opposant à Kadhafi leur a transmis quelques documents provenant des archives d’Abdallah Senoussi, l’ancien chef des services secrets libyens et beau-frère du Guide. A la suite de ce contact, Samir Shegwara a ensuite accepté d’adresser un ensemble beaucoup plus vaste de documents provenant de ce fonds d’archives, qu’il avait pu récupérer après la chute du régime en 2011. Je suis alors entré dans ce projet, fort de quelques expériences en matière d’archives et d’affaires liées au renseignement, au terrorisme et à la Libye.

Après avoir passé de nombreux mois à récupérer ces documents, les authentifier et les traduire, nous avons décidé de contre-enquêter afin de reconstituer l’ensemble des histoires que ces documents éclairent d’un jour nouveau : à savoir principalement, sous la houlette d’Abdallah Senoussi, la préparation, l’exécution, le suivi et les négociations liées aux attentats ayant détruit un avion de Pan Am au-dessus de Lockerbie (Ecosse) en décembre 1988, puis celui ayant visé un DC10 d’UTA au-dessus du Ténéré (Niger) en septembre 1989.

Longtemps, la Libye a nié son implication dans ces attentats, avant que des enquêtes menées en Écosse, aux États-Unis et en France, incriminent plusieurs responsables libyens, dont Abdallah Senoussi lui-même, condamné par contumace dans l’affaire d’UTA en 1999.

Les documents auxquels nous avons eu accès fournissent des informations inédites sur l’implication libyenne, les connexions entre les 2 attentats, le rôle de certains officiers dont le nom n’était pas apparu jusqu’à alors. Et aussi sur les négociations secrètes, entamées dès 1993 par Abdallah Senoussi pour se soustraire à la justice, puis pour tenter de faire annuler sa condamnation.

La possible impunité judiciaire de Senoussi -actuellement détenu en prison en LIbye – fut justement au cœur des discussions du présumé « pacte corruptif » entre le pouvoir libyen et les proches de Nicolas Sarkozy, en échange d’une promesse de financement de la campagne de ce dernier pour la présidentielle de 2007.

Notre enquête, enrichie de nombreuses autres sources inédites (américaines, britanniques et françaises) rejoint l’actualité du procès qui débute le 6 janvier au tribunal de Paris. Elle raconte l’histoire de Senoussi, un terroriste d’Etat, un assassin que certains voulaient sauver à tous prix. Un commanditaire d’attentats qui était au centre des tractations avec l’équipe de Sarkozy.

Plus de détails dans quelques jours sur cette enquête au long cours…